
Pour des milliers d'étudiants étrangers, la fin du gel des visas n'est qu'une petite victoire. Car si l'examen des dossiers a effectivement repris, il s'effectue dans un cadre plus strict. L'administration Trump assume, quitte à froisser un peu plus le monde universitaire américain. Les autres pays, eux, y voient une bonne occasion de séduire les étudiants étrangers. Faut-il y voir les premiers signes d'un changement dans les choix des candidats à l'expatriationÌý? Quel avenir pour les programmes d'échanges et la mobilité internationale étudianteÌý?
Visas étudiantsÌý: la difficile reprise
Soulagement. Après des semaines d'angoisse, les étudiants étrangers peuvent enfin poursuivre leurs démarches pour espérer obtenir leur visa. Il risque néanmoins d'y avoir des déçus. Le 18 juin, l'administration Trump a annoncé reprendre l'examen des dossiers, mais avec un contrôle drastique des réseaux sociaux des candidats. Ces derniers ne doivent avoir posté aucun contenu contre les États-Unis. D'après Washington, il s'agit de différencier les «Ìývrais étudiantsÌý», des «ÌýautresÌý». L'exécutif prévient que le durcissement des contrôles induit nécessairement des délais de traitement allongés.
Le bras de fer avec Harvard, temporairement interdite d'accueillir des étudiants étrangers, révèle néanmoins des dispositions tout autres. La suppression de la décision par la juge fédérale (le 20 mai) éteint l'incendie. Mais l'inquiétude demeure et s'internationalise. Exemple avec l'affaire de la princesse belge Elisabeth, étudiante à Harvard visée par le durcissement des règles. Dans le même temps, le président américain semble déterminé à empêcher l'arrivée de certains ressortissants étrangersÌý: étudiants venant de Chine, du Venezuela, du Laos, ou de Cuba. Plus tôt, en début de juin, le président interdisait l'entrée sur le territoire ou une restriction de visa pour les ressortissants d'une vingtaine de pays, dont une majorité en Afrique et en Asie.
Moins de talents aux États-Unis
Panique chez les étudiants étrangers. Inquiétude des économistes, pour qui l'annonce du gouvernement met à mal, non seulement le système éducatif, mais aussi le système économique.
La nouvelle politique de l'administration américaine repose sur un argument principalÌý: les étudiants étrangers prendraient les places des Américains. De plus, la présence de ces étudiants étrangers, futurs travailleurs, nuirait à l'emploi des Américains. Les entreprises seraient plus enclines à recruter des «Ìýtalents étrangers bon marchéÌý», moins chers que les talents locaux.
Une étude de la vient cependant contredire ce postulat. Selon ses conclusions, environ 2,1 millions d'étrangers venus avec un visa étudiant et titulaires d'une licence travaillaient à temps plein en 2023. Ils gagnaient un salaire médian de 115 000 dollars, contre 87 000 dollars pour les citoyens américains. L'étude montre que les diplômés étrangers gagnent généralement plus que les Américains. Ils sont plus nombreux à détenir un master ou un doctorat. On les retrouve dans les secteurs les plus rémunérateurs, notamment, dans les Technologies de l'Information et de la Communication (TIC), l'informatique, ou l'entrepreneuriat. Les talents indiens et chinois sont les mieux rémunérés (en 2023), avec respectivement 372 000 et 303 000 dollars annuels, alors que le salaire médian était de 146 000 et 125 000 dollars.
Les économistes rappellent que le système économique américain repose justement sur la contribution des étudiants étrangers entrés sur le marché du travail. Pour les experts, réduire le nombre d'étudiants étrangers reviendrait à limiter la croissance du pays.
Plus de talents dans les autres paysÌý?
Sans aller jusqu'à souffler «Ìýle malheur des uns fait le bonheur des autresÌý», les pays concurrents des États-Unis rivalisent pour accueillir les déçus du «Ìýrêve américainÌý». Les États-Unis, le Canada, le Royaume-Uni et l'Australie figurent comme les traditionnelles terres d'expatriation, tant pour les étudiants que pour les travailleurs étrangers. La carte du monde des é³Ù³Ü»å±ð²õ à l'étranger va-t-elle pour autant changerÌý? S'il est vrai que les traditionnelles terres d'accueil perdent en popularité, elles restent, en 2025, dans le top des destinations phares des futurs expats.
Miser sur les échanges universitaires pour attirer davantage d'étudiants étrangers
Mais face à des politiques migratoires plus restrictives, ces 3 pays se voient de plus en plus concurrencés par de nouvelles «Ìýplaces fortesÌý» de l'éducation internationale. Malgré le possible frein linguistique, le Japon, la Corée du Sud et la Finlande attirent davantage d'étudiants étrangers. Leurs principaux atoutsÌý: une expertise reconnue à l'international (par exemple, l'excellence des ³Ü²Ô¾±±¹±ð°ù²õ¾±³Ùé²õ japonaises en matière de recherche, d'ingénierie et de robotique), des cursus en anglais, des cours de langue, et un investissement dans les programmes d'échanges universitaires.
Ainsi, les ³Ü²Ô¾±±¹±ð°ù²õ¾±³Ùé²õ de , de , ou encore d' comptent sur les échanges linguistiques et universitaires pour gagner en popularité auprès des étudiants étrangers. Les étudiants étrangers se tournent également vers les Pays-Bas (comme l'université d'), l'Irlande (), le Costa Rica (), l'Afrique du Sud (), ou les ().
Le défi français pour recruter les talents américains
Le tour de vis de Trump touche aussi les talents locaux. En France, on retrousse les manches pour garder les talents de demain. Car le pays perd en attractivité face à ses concurrents anglophones. Pour se démarquer, le pays muscle ses enseignements en anglais et cible les secteurs porteurs, comme la recherche et les sciences. Lorsque Trump taille dans les budgets de la recherche et supprime «Ìýdes millionsÌý» de données scientifiques, la France lance sa plateforme «ÌýÌý» et déroule le tapis rouge aux chercheurs américains. Jeudi 26 juin, l'université d'Aix-Marseille a accueilli ses premiers scientifiques et promet. Reste à savoir si le pays aura les moyens de ses ambitions.
L'Allemagne, nouvel eldorado des étudiants internationauxÌý?
Ces dernières années, l'Allemagne et ses cursus d'excellence en ingénierie et technologies de l'information ont attiré un nombre croissant d'étudiants étrangers. Comme l'Italie, la Croatie, l'Espagne et d'autres pays européens, l'Allemagne fait face à une baisse démographie et au départ de ses jeunes diplômés. Sa croissance, elle la doit en partie grâce aux étudiants étrangers. Leur nombre a bondi de +Ìý10Ìý% en 2024 (étrangers inscrits en 1re année). En parallèle, le nombre d'étudiants allemands en 1ère année a baissé de 1,1Ìý%. Mais s'ils contribuent à la croissance du pays, les étudiants étrangers rencontrent davantage de difficultés à obtenir un emploi pérenne. Reste à savoir quelle orientation donnera le nouveau chancelier Friedrich Merz. S'il atteste que «Ìýl'Allemagne est un pays d'immigrationÌý», il annonce également un changement de politique, afin de «Ìýlimiter les migrationsÌý».
Quel avenir pour la mobilité internationale étudianteÌý?
Où partir faire ses é³Ù³Ü»å±ð²õ en 2025Ìýou même après ? Les mesures de l'administration Trump auront-elles un impact comparable au BrexitÌý? La sortie du Royaume-Uni de l'Union européenne avait particulièrement impacté les étudiants européens. Les ³Ü²Ô¾±±¹±ð°ù²õ¾±³Ùé²õ ont rapidement constaté une chute des inscriptions, face à de nouveaux frais de scolarité exorbitants. S'oriente-t-on vers un phénomène similaire, mais à l'échelle mondialeÌý? Difficile de trancher. L'aura des ³Ü²Ô¾±±¹±ð°ù²õ¾±³Ùé²õ américaines reste puissante. Universités bien décidées à maintenir la pression sur le gouvernement américain. Mais pour certains, le climat actuel pourrait bien dissuader les futurs étudiants étrangers et leurs familles.
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