Pour info : Journal du CNRS
Ethnopharmacologie
Un « remède de grand-mère » contre le paludisme
Une équipe de chercheurs vient de prouver l'efficacité d'une infusion traditionnellement préparée en Guyane pour traiter le paludisme 1… « Tout est parti d'une étude ethnopharmacologique réalisée par nos collègues de l'IRD, commente Didier Stien, chercheur du laboratoire « Écologie des forêts de Guyane » (Ecofog) 2 en Guyane. Ils ont recensé puis testé 35 remèdes traditionnels aux vertus antipaludiques utilisés couramment par la population guyanaise en complément des médicaments “du Nord”. Certains se sont révélés particulièrement actifs, et notamment l'infusion de feuilles de Quassia amara, une plante qui pousse ici, dans les jardins et autour des habitations. »
Une fois l'activité avérée, restait à déterminer son origine. C'est dans ce but que les chimistes Didier Stien et Émeline Houël ont réalisé, en collaboration avec Valérie Jullian, de l'IRD, une analyse de cette préparation traditionnelle. Après en avoir séparé puis testé les différentes molécules, ils sont parvenus à mettre en évidence celle responsable de l'activité antipaludique : la simalikalactone D ou Sk D. Au-delà, ils ont montré que cette activité est aussi importante que celle de l'artémisinine, l'une des molécules les plus efficaces aujourd'hui commercialisées 3.
Ces travaux ouvrent une nouvelle piste pour la fabrication de médicaments antipaludiques à partir de la Sk D. Mais ce n'est pas là leur seul intérêt. « Le paludisme est la maladie la plus répandue dans le monde et touche souvent des populations, en Afrique notamment, qui n'ont pas accès aux médicaments occidentaux comme la chloroquine ou l'artémisine. La validation scientifique d'un tel remède d'automédication s'avère donc très intéressante pour ces populations, d'autant qu'il existe en Afrique une plante analogue à Quassia amara, Quassia africana, qui contient, elle aussi, la Sk D », commente Didier Stien. Forts de ce premier résultat, les chercheurs envisagent de tester d'autres remèdes afin d'élargir l'éventail des molécules connues actives contre le paludisme. Une artillerie qui permettrait de mieux s'armer contre le Plasmodium 4 et ses formes résistantes qui apparaissent régulièrement.
 
Stéphanie Belaud
 
Notes :
1. Résultats publiés dans Journal of Ethnopharmacology (version internet), 27 avril 2006.
2. Laboratoire CNRS / École nat. génie rural des eaux et forêts / Cirad / Inra.
3. Elle est aussi extraite d'une plante, Artemisia annua.
4. Quatre espèces de Plasmodium, agent responsable du paludisme, peuvent infecter l'homme. Trois sont présentes en Guyane : P. falciparum – la souche mortelle, P. vivax et P. malariae.
Contact
Didier Stien
Laboratoire « Écologie des forêts de Guyane » (Ecofog), Cayenne
didier.stien@guyane.cnrs.fr
henriri :
J'avais lu sur d'autres plantes curatives et aussi sur les plantes répulsives, mais cet article a l'air sérieux, fonçons sur les guyanais pour nous faire envoyer cette plante et la recette ! Que vivent les futurs horticulteurs généreux !
Et merci aux chercheurs qui communiquent.